Terceira, la culture des traditions

17/06/2013 10:48

C'était en 1980, le soir du nouvel an. La terre a tremblé dans la ville d'Angra do héroismo sur l'île de Terceira détruisant en grande partie les édifices de la ville. Les habitants fêtaient heureusement pour la plupart l'événement à l'extérieur. La ville a été reconstruite à l'identique, dans le respect des savoir-faire et des matériaux, ce qui en fait aujourd'hui un lieu plein de charme où l'on a plaisir à flâner devant des façades colorées. La ville entière est classée au patrimoine mondial de l’Unesco. Dans le port, aux côtés de Black Beatle, nous sommes au cœur de la ville que nous arpentons de long en large.

Dans les villages aux alentours règne une effervescence : on prépare la tourada da corda. L'histoire veut que les envahisseurs espagnols aient été chassés de Terceira par les taureaux envoyés par les açoriens sur la plage de Praia da Vitoria il y a plus de 400 ans. Depuis lors, on lâche les taureaux dans les rues du village et les jeunes gens sont amenés à montrer leur courage en touchant la bête devant la maison de leur fiancé qui regarde au balcon. Nous ne sommes pas franchement branchés tauromachie sur Océanix, mais on nous promet que le taureau n'est jamais blessé, alors, avec Fabien de Black Beatle, on part un soir pour le petit village de Terra Cha où doit se ternir l'événement. Toutes les maisons sont déjà barricadées, et les femmes et les enfants mis à l'abri. Rapidement on nous propose très gentiment l’hospitalité. Sur la terrasse de cette maison, on a une vue imprenable sur le spectacle : le taureau est lâché mais maintenu par une longue corde. Il est harcelé par des ombrelles de couleur. Les deux que nous verrons ne serons pas franchement féroces, même si je n'aurais pas aimé être dans la foule des hommes valeureux. En rentrant à pied à Angra do Héroismo, on admire plusieurs Emporios de Esperito Santo ( empires du Saint Esprit) aux couleurs vives et aux trois fenêtres. Ce sont de minuscules chapelles qui servent toute l'année. Les Açoriens sont très pieux et les emporios servent encore chaque dimanche pour implorer la protection contre les catastrophes qui menacent les Açores et pour porter la soupe de viande aux plus démunis.

Il est tant pour nous de changer de port pour aller voir une autre facette de cette île. Mais alors que Black Beatle quitte la marina, Jean-Camille trébuche dans notre cabine et s'ouvre l'arcade sourcilière. A la capitainerie, on nous appelle vite un taxi qui nous emmène aux urgences. Traductrice officielle de la famille, je m'occupe des formalités, bien contente d'avoir fait faire avant de partir nos cartes de sécu européennes. Au moment de rentrer dans la salle de soin, le médecin préfère que je reste à l'extérieur. Il garde Jérôme pour maintenir le petit blessé, la mère, sans doute jugée trop sensible, n'est bonne qu'à attendre en entendant son fils hurler.... mais quelques minutes plus tard c'est Jérôme qui ressort, traîné par deux aides soignants : il a perdu connaissance après la deuxième injection ; sensible aussi, le papa ! On s'en sort avec trois points de suture sur un petit pirate à retirer dans 5 jours, ce qui nous laisse le temps de rejoindre Black Beatle à Praia da Vittoria , mais nous empêchera d'aller sur San Miguel retrouver Zolugo.

Changement d'ambiance, on arrive dans une station balnéaire, la plage à moins de 10 mètres du bateau. Le port est complet, on se met à couple d'un bateau français dont on va vite faire la connaissance : C'est Farol, une famille de Morlaix avec trois enfants : Marin 15 ans, Louise 13 ans et Jeanne 12 ans. Ils finissent comme nous un tour de l'Atlantique sur un an et nos enfants ne vont plus se quitter pendant 5 jours, passant d'un bateau à l'autre, s'organisant des soirées spaghettis et poker, partageant leurs films et leurs jeux de carte, jouant au beach volley ou sautant à l'eau du bateau ( trop froide pour les parents ). Pour nous aussi, beaucoup de rencontres dans ce port. Nos copains de Noirmoutier qui nous surveillent grâce à la webcam sur la falaise qui domine le port, nous mettent en contact avec deux sœurs, profs de maths à la retraite, qui voyagent ensemble depuis toujours et nous racontent leurs tours du monde, le Pacifique, Tahiti, l'Argentine, l'Alaska, le Chili....nous passons un dimanche avec elles à voyager en ayant l'impression d'avoir rencontré les cousines de Moitessier. Au port arrivent aussi Jeu de Mer, les Just sail it et les Kiklak, des bateaux de jeunes en fin d'étude partis pour un an aussi et que nous retrouvons avec plaisir. Mais nous sommes en plein décalage horaire. Le soleil ne se couche plus à 18h comme aux Antilles. Nous finissons nos soirées à 2h du matin alors que nous sommes persuadés qu'il n'est que 10h. Et comme on veut profiter de nos journées et de cette belle île, on visite une grotte de lave, une laiterie, les piscines naturelles de Biscoitos... C'est donc avec ce manque de sommeil que nous partons du port ce lundi après avoir faire retiré les points de notre courageux garçon et écourté les adieux déchirants avec Farol. Encore une bonne semaine de navigation pour atteindre le continent européen. Courage, cap à l'Est !